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CERAPS ET ESPOL

Une stabilité relative : état des forces politiques dans le Nord-Pas-de-Calais après les deux tours des municipales

Réflexions Par | 01 juillet 2020

A l’issue du premier tour, des chercheurs-spécialistes du CERAPS (Centre d’études et de recherches administratives politiques et sociales – Université de Lille) et de l’ESPOL (European school of political and social science de l’Université catholique de Lille) avaient passé au tamis les résultats des municipales dans les cent plus grandes communes du Nord et du Pas-de-Calais (relire leur analyse ici). Ils récidivent pour ce second tour et dressent ainsi un état des forces politiques en région. Voici leur analyse.

Une contribution de Tristan Haute (CERAPS/Université de Lille) et de Marie Neihouser (ESPOL/Université catholique de Lille).

Le second tour des élections municipales, qui a eu lieu dimanche 28 juin, a été marqué, autant que lors du premier tour le 15 mars dernier, par un très faible taux de participation, lequel ne s’est élevé qu’à 41,6 % à l’échelon national, alors qu’il atteignait 62,1% en 2014. Comme au premier tour, la participation semble avoir été fortement handicapée par l’épidémie de Coronavirus, sans pour autant qu’il s’agisse de l’unique facteur de l’abstention massive de ce 28 juin.

Cette très faible participation et la « vague verte » observée dans les grandes villes françaises et illustrée, dans notre région, par le duel très serré à Lille entre Martine Aubry (PS) et Stéphane Baly (EELV) ont focalisé l’attention au soir du second tour. Pourtant, observer les résultats à une échelle plus large donne à voir d’autres évolutions. Ainsi quel bilan peut-on tirer de ces élections dans le Nord et le Pas-de-Calais ?

Une apparente stabilité du paysage politique

À l’issue du scrutin de 2020, sur les 100 plus grandes villes du Nord et du Pas-de-Calais, 51 sont détenues par la gauche, 47 par la droite et le centre et deux par le Rassemblement National. Par rapport au précédent scrutin, en 2014, le nombre de communes dirigées par la gauche reste stable, alors que la droite et le centre détiennent une commune de moins. Seul le RN progresse donc avec la conquête de Bruay-la-Buissière. Mais cette victoire masque aussi les nombreux échecs enregistrés au premier tour, y compris dans des villes que le parti de Marine Le Pen espérait conquérir comme Denain, Lens ou Carvin.

L’effet « sortants » observé lors de ces élections n’est pas étranger à cette apparente stabilité. Rappelons que 69 des 100 plus grandes communes du Nord et du Pas-de-Calais ont élu leur maire dès le premier tour, contre seulement 56 six ans plus tôt. Surtout, sur ces 69 communes, 66 ont réélu l’équipe sortante. Si, au second tour, les sortants ont été parfois malmenés, ils ont tout de même retrouvé leur siège dans 17 des 31 communes concernées.

En tout et pour tout, seules huit des 100 communes ont par ailleurs basculé de gauche à droite ou de droite à gauche en 2020, contre 23 en 2014. On va voir que cette stabilité est toutefois en trompe-l’œil. En effet, on observe de nombreuses alternances municipales entre des listes de droite et du centre. Parallèlement, des mouvements de recomposition apparaissent également à gauche où le PCF et, dans une moindre mesure le PS, poursuivent leur déclin.

Des mouvements importants au sein de la droite

Même si le nombre de communes détenues par la droite et le centre est peu modifié, de nombreux bouleversements sont à signaler. Lors du scrutin de  2020, sept des 44 communes qui étaient toujours dirigées par la droite et le centre ont vu leur sortant défait. C’est par exemple le cas à Hautmont, où un duel familial opposait le fils et le père Wilmotte, à Hazebrouck ou encore à Wambrechies. Par ailleurs, au sein de la droite et du centre, l’utilisation de l’étiquette « divers centre » est beaucoup plus fréquente qu’en 2014 et 4 des 100 communes considérées, toutes dans la métropole lilloise, ont vu la défaite d’un candidat Les Républicains ou « divers droite » au profit d’un candidat « divers centre » (Lambersart, Halluin, Comines, Pérenchies). Ainsi, si la République en Marche ne s’est pas implantée dans le Nord et le Pas-de-Calais, perdant même la commune d’Arques dont la maire était l’une des rares à avoir rejoint le mouvement, l’étiquette centriste semble avoir le vent en poupe.

À gauche, un déclin relatif du PCF et du PS

Si la gauche reste quasiment stable en nombre de villes détenues par rapport à 2014, rappelons que les pertes avaient été nombreuses il y a 6 ans puisque, avant le scrutin de 2014, la gauche gérait 69 des 100 plus grandes communes du Nord et du Pas-de-Calais, soit 18 de plus qu’aujourd’hui. On observe en outre, comme à droite, des évolutions contrastées au sein de la tendance. Le PCF poursuit son déclin. Avant 2014, il détenait encore 16 des 100 plus grandes communes de l’ancienne région, un chiffre qui était tombé à 14 après le scrutin de mars 2014. Or, dimanche dernier, le PCF n’en a conservé que 12, enregistrant deux nouvelles défaites face à la droite dans ses bastions de Seclin et de Marly, où le maire historique Fabien Thiémé est décédé en décembre dernier. Notons toutefois que la France Insoumise remporte son premier édile avec la conquête sur la droite de Faches-Thumesnil.

Pour autant, contrairement à ce qui a pu se passer jusque dans les années 2000, ce déclin ne profite plus au Parti Socialiste. Non seulement le PS perd Bruay-la-Buissière et Saint-Martin-Boulogne, mais de plus en plus de maires socialistes choisissent d’étiqueter leur liste « divers gauche » comme à Oignies ou même « divers » comme au Portel.

Ainsi, moins qu’un recul de la gauche, ce scrutin est marqué par un affaiblissement des partis traditionnels que sont le PCF et le PS aux dépens d’élus « divers gauche », preuve d’un affaiblissement structurels des « partis politiques » au niveau local. Cet état de fait n’a donc pas non plus permis à EELV, présenté comme le grand gagnant au niveau national et dans les grandes villes, d’exister dans la région, sauf à retenir la bataille acharnée pour Lille ainsi que les quelques bons résultats obtenus dans la métropole lilloise à Villeneuve d’Ascq, Ronchin ou La Madeleine.

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