Réflexions Par Marc Prévost | 06 juin 2013
ANALYSE. Municipales 2014, plus que neuf mois. DailyNord continue d’accompagner cette échéance électorale importante pour la vie du Nord – Pas-de-Calais (retrouvez les articles consacrés sur cette page). Aujourd’hui, tour d’horizon des plus grandes villes régionales, des forces déjà en présence et des possibilités de basculement… ou non (*).
Aubry seule en tête ? On serait tenté de le croire, tant la droite peine à rassembler ses forces. De plus, le bilan de Martine Aubry est globalement positif après un travail en profondeur et de longue haleine sur les quartiers en termes de réhabilitation et de renouveau urbain (bémol : le quartier de Lille-sud et le faubourg des Modes, retrouvez notre bilan après ses dix premières années à la mairie de Lille). Le sénateur Lecerf a certes des atouts, et son défi ressemble à celui d’un Alex Türk en 1995. L’ancien maire de Marcq-en-Baroeul (et l’adversaire socialiste ne fera pas l’économie d’un procès en bourgeoisie) ne devrait pas avoir de souci pour rassembler les opposants républicains, des MoDem déçus du bayrouisme aux CNI modérés en passant surtout par l’UDI, borloïste ou non, ni proposer un programme pertinent. Le premier écueil sera évidemment le Front national, qui n’en doutons pas, se maintiendra au second tour s’il le peut. Question : un Lecerf battu de peu pourrait-il revendiquer l’investiture de la droite à la communauté urbaine, a fortiori si une majorité favorable se dégage après les municipales ?
Pierre Dubois ne devrait pas être un maire de transition comme il avait pu un temps le laisser croire. Qu’en pense un Renaud Tardy, adjoint de longue date et prétendant haletant à la succession ? L’hypothèse d’un Frédéric Salat-Baroux parachuté aux couleurs de l’UMP semble avoir « pschiitté » dans la bulle médiatico-politique parisienne. A l’évidence, la droite n’a pas encore réussi à remplacer un Diligent, habile tacticien et grande figure centriste, qui avait su dépasser les luttes de clans et de chapelles pour renverser la mairie socialiste en 1983. Même si la situation politique roubaisienne reste fragile, la gauche part avec un avantage sur une droite hésitante qui rêve d’un blitzkrieg. Guillaume Delbar, chef de l’opposition municipale, peut-il tenir la baraque ?
Pour la droite, un serpent de mer vieux comme un coelacanthe (un peu exagéré, non ?). Si la réalité de Tourcoing est celle d’une ville « à bascule », elle suscite les appétits d’une droite sans cesse à l’affût mais qui n’a jamais réglé sa mire. Trop à droite avec un Vanneste parfait laboureur de terrain électoral, et qui échouera trois fois au pied du beffroi. Trop indécise avec le député RPR Patrick Delnatte. Trop mal assurée avec le RPR puis CNI, de forte composition dissidente, Didier Droart. Alors, trop jeune avec Gérald Darmanin, l’un des cadets les plus doués de sa génération, député à 30 ans après une estocade – pas très fair-play, malgré tout – à son ancien mentor Christian Vanneste, digne d’une certaine tradition antique ? En face, un Michel-François Delannoy, successeur de l’emblématique socialiste gestionnaire Jean-Pierre Balduyck, saura faire valoir un bilan consistant. Si Tourcoing n’a pas « encore » changé, les opérations de la « Plaine Images » ou de la rénovation du centre ville sont à porter au crédit du maire sortant.
En reprenant son fauteuil de maire en 2008, Gérard Caudron avait voulu laver l’affront fait à lui quand les socialistes l’abandonnèrent en rase campagne malgré les promesses d’hier. Le fier et ombrageux édile a-t-il jeté la rancune à la rivière pour mieux passer le flambeau ? A mi-mandat par exemple. Rien n’est moins sûr et il est bien candidat à sa propre succession. Mais la roucoulade appuyée aux élus EELV – Eric Quiquet, adjoint à Lille, Florence Lecocq à VA, mais d’autres noms sont possibles, comme celui de Sandrine Rousseau, enseignante à Lille I, et toutes les configurations et alliances sont envisageables – est-elle porteuse de réponse dans une ville où le combat politique atteint parfois des sommets de violences pas seulement symboliques ? Pour l’instant, ces questions sont posées.
Habile, le sénateur MoDem Jean-Marie Vanlerenberghe a installé avant terme Frédéric Leturque dans son fauteuil majoral pour mieux le laisser partir au feu. Un peu comme l’autre centriste André Diligent l’avait fait à Roubaix avec René Vandierendonck en 1994. De même, le maire sortant pourra compter sur le soutien de l’UMP avec qui il dirige la ville. La communauté urbaine est tombée dans l’escarcelle de l’UMP Philippe Rapeneau par la grâce du même J-M Vanlerenberghe. Du pur centrisme, on vous dit. François Desmazière, adjoint écarté interviewé ici-même et candidat du changement, peut-il vraiment faire pencher la balance en 2014 ? Tout comme la gauche ?
Attention, danger ! La Ville des Bourgeois a longtemps été à gauche. Version communiste. Et le PS affiche des ambitions affirmées sur la plus grande ville du Pas de Calais. Question : comment mener l’assaut avec un Front de gauche, allié de plus en plus remuant, qui voudra prendre sa revanche en la personne de l’ancien maire communiste Jacky Hénin ? Le nouveau leader socialiste en puissance du département, Yann Capet, député du secteur, devra d’abord résoudre l’équation s’il veut avoir une chance réelle de disputer le beffroi à la sénatrice maire sortante UMP Natacha Bouchart. Une équation qui passera forcément par des négociations au plus haut niveau entre le FdG et le PS sur le mode échanges de services et de bons procédés. Calais fera ainsi certainement l’objet d’un nouveau deal.
Là encore l’incertitude règne sur la cité audomaroise. Après la longue domination – un quart de siècle – du RPR Jean-Jacques Delvaux, c’est le socialiste Bruno Magnier qui est aux commandes. Dans les années 80, le premier fut un poulain « à la chiraquienne », même s’il n’en avait pas le style, lui le prof de compta épris de nature et de calme. Puis le vent à tourné et l’alternance a pointé son nez. Et pourrait bien faire de même l’année prochaine, dans une ville où François Descoster, l’opposant, ne perd jamais une occasion de tailler la politique du maire sortant…
Ex-jeune louveteau devenu loup de la politique, étiqueté RPR versant balladurien après avoir débuté non loin de Chaban-Delmas, un temps pressenti pour entrer dans un gouvernement, Jacques Vernier, ingénieur X- Mines et élu pour la première fois maire en 1983, puis député européen, conseiller régional, député à l’Assemblée nationale, entretient un certain mystère quant à sa succession. Il se dit que le maire viserait l’intercommunalité douaisienne. Mais auparavant, il lui faut régler sa dévolution, et là…C’est que les nuages se sont accumulés sur la cité de Gayant. Et les disputes : quelques adjoints se rebiffent et pestent contre la mainmise dans le temps du maire : ainsi, il y a quelques années, la rupture consommée avec Jean-Jacques Delille sur fond de dossier calamiteux du bus-tram Evéole et de ras-le-bol d’une emprise autocratique présumée. Trente ans, ça suffit ! Alors ? Son adjointe François Prouvost sera-t-elle en capacité de garder la ville à droite ? La succession ne s’annonce pas sous les meilleurs auspices. Du coup, l’hypothèse du parachutage d’une pointure nationale refait surface.
C’est la conjecture à la mode dans les dîners en ville. Le vieux flibustier est-il usé ? « Delebarre entame son combat de trop. Les gens en ont marre… ». A l’appui de leurs jérémiades, la longévité du sénateur dunkerquois à la barre de la ville de Jean-Bart, un quart de siècle l’année prochaine. Mais l’ancien prétendant à la succession de Pierre Mauroy à Lille n’a cure de ces quolibets et ménera sa barque comme il l’entend. Si successeur il y a, il sortira bel et bien de la cuisse de Jupiter ! Champion de l’empilement des mandats et des responsabilités, Michel Delebarre sera ainsi – pour la troisième fois – touché par une loi anti-cumul. Patrice Vergriete, l’ancien patron de l’agence d’urbanisme de la ville, vient de rompre avec quelque fracas les ponts avec l’ancien ministre de la ville et se lance dans l’aventure en dénonçant le « système ». Son profil techno – X-Ponts, ancien des cabinets Aubry et Bartolone – n’est pas vraiment un atout mais, natif de la ville, désormais à son compte et sans étiquette, il connaît bien les dossiers dunkerquois puisqu’il a été adjoint aux sports avant de démissionner également du PS. Le duel avec le vice-président du conseil régional, Wulfran Despicht, gendre du « tsar » Delebarre qui l’a fait adjoint, et dauphin putatif, s’annonce sans merci. Et on parie que l’Arena, salle multifonctions à 110 millions d’euros, bébé de Delebarre, aura un grand rôle dans les débats…
La ville dont Jean-Louis Borloo a été le maire pendant treize ans peut s’enorgueillir de sa métamorphose, au moins aussi spectaculaire que celle de Dunkerque. Et le sillage de l’ancien ministre de la ville (tiens ! comme Delebarre… ) ne dévie pas d’un pouce : Dominique Riquet comme Laurent Degallaix ont suivi ou suivent la même feuille de route. Ce dernier devra assumer la succession et confirmer la trajectoire. Il est vrai que Borloo, patron d’une jeune UDI bâtie avec les restes de l’UDF et du MoDem, et qui nourrit quelque ambition nationale et locale – mais laquelle ? -, ne peut se permettre de « perdre » la ville qui l’a fait ministre pendant dix ans…
Ce sera l’un des enjeux de ces municipales bien au delà de la scène régionale. Car le Front national flaire l’hallali d’un camp politique en déliquescence depuis des années avec l’affaire Dalongeville pour ne citer qu’elle. Marine Le Pen et Steeve Briois savent que la mairie est à leur portée et ils asséneront leur discours de crise sans états d’âme. La gauche apparaît trop divisée et empêtrée dans ses querelles intestines pour proposer une offre crédible. Pour l’électeur héninois, impossible de zapper le déroulement des procès judiciaires qui s’enchaînent comme à la parade. Question : en cas d’alternance, qui portera le chapeau à gauche ?
(*) Quelques villes d’importance ne sont pas forcément citées dans cet article (Marcq, Lens, Liévin, Boulogne-sur-Mer, Maubeuge par exemple). Mais nous aurons bien entendu l’occasion d’en reparler ces prochains mois.
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les élections municipales arrivent prochainement et il a été annoncé qu’un autre candidat PS se présenterait à Lens contre le très nouvellement « maire » sortant (nouvellement nommé par Guy Delcourt le seigneur pensait pouvoir désigner son héritier..en oubliant la Démocratie ) c’est très bien : il n’appartient qu’au peuple de désigner ses représentants … mais pourquoi alors permettre à l’actuel maire de Liévin (désigné de la même manière par son prédécesseur) qui lui en plus devrait avoir à rendre des comptes sur le financement du PS du pas de calais et plus particulièrement de la section de Liévin puisqu’il était le trésorier à savoir Laurent Duporge de se présenter ?, y aurait il deux poids deux mesures M Harlem Désir ou Mme Martien Aubry ; les électeurs PS de la commune attendent votre position sur le sujet …. puissions nous ne pas avoir à attendre trop longtemps ….
Je lis l’analyse sur Calais…Un duel qui au final se pourrait être » Capet-Hennin » contre l’UMP Bouchard,…Or vous ne parlez pas d’un FN qui navigue autour des 25 % à 30 % actuellement
( sondages dans les quartiers populaires ) et qui ne baissera pas sa culotte en faisant cadeau de
12 % de voix,comme l’ancien candidat Dubout,qui s’est retiré gratuitement ( au grand dam de ses électeurs ),et grâce à qui Bouchard fut élue,avec seulement 8 % d’écart..Cela veut dire que des électeurs du FN n’ont pas voulu voter UMP..Je crois que la leçon a été faite au FN,et la liste se maintiendra jusqu’au,y compris au deuxième tour..Paraît que Bouchard n’est pas à l’aise d’après certains chroniqueurs politiques
Oui, le FN est fort sur Calais et jouera un rôle…important.
Il ne vous pas échappé que l’article date de début juin. Et le FN a encore monté d’un cran depuis, et ceci un peu partout en France.