DailyUne | Petite histoire Par Nicolas Montard | 14 février 2010
Le nombre de lectures de ses posts ferait pâlir plus d’un blogueur, voire même un média. 5 000, 10 000, 20 000 voire 93 000. Faut dire que Maître Mô traite d’un sujet à l’audience légendaire : la justice. Régulièrement, sur son blog, l’avocat pénaliste lillois nous raconte ces petites histoires de Palais. En tirant ostensiblement à la ligne, à contretemps du web et avec talent. Rencontre avec ce blogueur du Nord.
Au premier abord, on se dit que Maître Mô est fou. Faire un billet de 35 000 signes sur un blog… A l’époque où la règle, c’est 140 signes si possible en abréviations et une ou deux fautes au passage… Ça plante le décor. Un texte imbuvable certainement. Sauf lorsqu’on voit qu’il a été lu près de 93 000 fois en quelques mois, soit le record du blog. Ne voulant pas mourir idiot, le journaliste se met à parcourir le texte. Petite Fille, c’est l’histoire de Jade, une gamine violée par le copain de sa mère. Petite fille, c’est toute cette histoire, mais aussi la suite quand la désormais adolescente décide de prendre un avocat. Petite fille, c’est une sacrée leçon de vie à la fin. Et Petite fille, c’est aussi certainement l’un des textes qui remue le plus les tripes dans la blogosphère nordiste – voire nationale vu l’impact – actuellement. « Dans les commentaires, des lecteurs avouent qu’ils ont pleuré en lisant le texte… C’est étrange mais c’est aussi une récompense, ça veut dire que j’ai réussi à faire passer le message. »
Maître Mô. Pas le droit de vous filer son vrai nom même si, dans le petit monde de la justice lilloise, tout le monde sait sous quelle robe noire se cache le blogueur. Un avocat pénaliste de 43 ans. Reconnu faut-il le préciser. Bien avant les premiers posts sur son blog qui remontent à bientôt trois ans : « Comme ça, on ne peut pas m’accuser de me servir de mon blog pour ma carrière, se marre l’avocat. C’est à cette époque que j’ai découvert réellement les possibilités d’internet. J’ai toujours aimé écrire et vu que là, on pouvait créer un blog en 25 secondes, j’y suis allé. » Trois ans plus tard, il y est toujours. Sauf que de novice en langage web, il est devenu un expert. « Oui, j’ai programmé pas mal de choses. Mais j’y passe du temps. » Du temps ? Maître Mô est un lève-tôt. Alors entre 4h et 7h, à l’heure où vous dormez encore, il s’occupe de ses affaires virtuelles avant de s’attaquer aux affaires réelles…
Mais on n’est pas là pour parler des qualités techniques de Maître Mô. Plutôt du contenu. Petite Fille et ses 35 000 signes ne sont pas une exception. Demander à Maître Mô d’écrire une brève est un crime de lèse-écriture. Déformation de plaidoirie ou non, notre avocat adore palabrer sur son clavier. Le plus longuement possible. Avec des parenthèses, des notes, des digressions, tout ce que vous voulez… Faut dire que notre Lillois a le vécu. Seize ans d’histoires pénales derrière lui. Du coup, il les réécrit, les histoires. En garantissant l’anonymat bien sûr. Et en veillant à ne blesser personne, ni accusés, ni victimes. Et ça marche : ces petites histoires, tantôt sensibles, tantôt à contre-courant, tantôt par épisodes (on vous conseille notamment les Histoires noires), séduisent les lecteurs. 20 000 visites environ chaque mois. Alors que le blogueur publie parfois de façon erratique…
« Je n’ai pas de mérite, le thème est vendeur… », se défend-t-il, comme pour minorer le succès du blog. Certes, mais tout le monde ne sait pas parler de sang avec talent. Et même quand il ne narre pas ces petites histoires, quand il s’interroge sur les lois, l’avocat réussit à intéresser le chaland (voir le débat sur l’inceste par exemple). « Mais je ne suis pas forcément tout le temps sérieux. Parfois, je fais de l’humour bébête, noirâtre. Ça fait du bien aussi. » Car le blog, pour Maître Mô, c’est aussi une soupape. L’occasion d’évacuer les dossiers parfois très lourds à porter, de quitter les propos obligatoirement policés d’une salle d’audience. « Et à force, ça change aussi mon regard sur les choses. Tu es dans ta profession d’avocat, tu ne vois plus forcément les choses comme il faut. Des commentaires peuvent te les faire voir différemment. L’interaction est intéressante. Je m’enrichis.»
Et donc, notre Maître, qui a même été classé 3e à la Wikio Parade, l’un des outils références des blogueurs, n’a-t-il pas pris la grosse tête avec tout ça ? D’autant que comme il l’avoue, il a parfois l’impression que, dans les salles d’audiences, certains magistrats font plus attention à leurs actes et paroles en sa présence… Ou que bizarrement lors de l’une de ses interventions sur Didier Beauvais, le magistrat qui avait fait la Une l’an dernier sur les soirées nordistes, son blog n’est plus accessible dans tous les ordinateurs liés à la Chancellerie ? « Les gens ont gueulé pour moi. Accident selon la Chancellerie. Ça a vite été rétabli. Mais non, il faut garder les pieds sur terre. Tout ça est virtuel… Même si ce blog est une forme d’orgueil, il ne faut pas s’en cacher. » Et relativiser, ajoute-t-il. « J’ai eu la chance d’être référencé chez Eolas par exemple, ce qui a permis au compteur de visites d’exploser. Et à la bande-passante du site aussi ! » Quant aux affaires, les vraies, est-ce que son activité virtuelle a fait grimper le nombre de ses clients ? « Il est arrivé que des clients viennent me voir grâce au blog. Mais ça reste une minorité. » Car encore une fois, Maître Mô avait sa réputation bien avant toute cette fièvre bloguesque. En tout cas, et vous l’aurez certainement compris, on vous invite à vous plonger dans ses écrits. Car même quand Maître Mô écrit à sa concession automobile, ça vaut le détour…
Crédit photo Une : Maître Mô qui a pris en photo une statuette du sculpteur Forchino.
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Merci ! Pour les compliments, et les liens ! (Voilà, je prouve que quand il le faut, j’arrive quand-même à faire court…)
Article un peu gâché par le tacle initial et démago contre Twitter. Car quel est le rapport, je vous le demande ? Maître Éolas est grand utilisateur de Twitter, alors que ses articles de blog ne sont pas non plus de brèves de comptoir.
@ Tom Rakewell. En relisant l’article, nous ne voyons aucun tacle à l’encontre de twitter. L’idée est simplement de dire que la prose de Maître Mô est à contre-courant du micro-blogging et de l’information condensée. Quant aux abréviations et aux fautes d’orthographe, celles-ci sont bel et bien une réalité du micro-blogging qui s’apparente parfois au langage texto.