DailyUne | Réflexions Par Ch. D. | 19 janvier 2010
« Etre communiste à 20 ans, c’est avoir du coeur; l’être à 40 ans, c’est ne pas avoir de tête ». C’est l’adage qui l’a dit. On a voulu s’en assurer. Peut-on être encore communiste à quarante voire cinquante balais ? Et puis d’abord, c’est quoi être communiste en 2010 ? Après avoir interviewé un jeune de 19 ans de droite (lire l’article), DailyNord a interrogé Georges Gastaud, secrétaire national du PRCF (Pôle de renaissance communiste en France) et prof de philo à Lens. Cinquante-huit printemps au compteur dont une quarantaine à militer sous la bannière communiste. Et pas essoufflé du tout notre bonhomme.
Ça le fait sourire quand on lui ressert le fameux adage. « J’ai plus de cinquante ans et je crois avoir toute ma tête. » Notre homme a rendu sa carte du Parti en 2004, après trois décennies de bons et loyaux services (« Je pensais que le PC était devenu une force d’appoint du PS »). Entré en résistance, il milite désormais au sein du Pôle de renaissance communiste en France dont il est l’une des chevilles ouvrières. Communiste donc. Et ça date pas d’hier. Né à Monaco (oui, ça aussi ça le fait sourire), il a effectué ses classes militantes lorsqu’il était étudiant peu après mai 1968. Avoir vingt ans en plein bourbier vietnamien, ça en a convaincu plus d’un. Mais en 2010 ?
« Comment peut-on ne pas être communiste en 2010 avec ce que donne le capitalisme ?« Ah ce fichu capitalisme… Incollable sur le sujet. « Nous vivons dans un monde indécent: les 250 plus grosses fortunes de la planète possèdent autant que le milliard d’individus le plus pauvre de la planète. Même à l’époque des pharaons, il ne me semble pas qu’on ait eu un tel affichage de classes. » Imparable. « En répartissant les richesses, on pourrait régler la famine en cinq ans ou dix ans, mais on ne le fait pas. » Imparable aussi. Et un dernier argument, à propos du climat au lendemain de Copenhague: notre homme se régale du propos d’Hugo Chavez, le président vénézuélien: « Si le climat était une banque, on l’aurait déjà sauvé depuis longtemps. » Moralité, il n’est nul besoin d’être communiste, mais juste « cartésien ».
D’accord. Mais qui dit communisme, dit URSS. Et aussi goulag, purges staliniennes, libertés muselées et j’en passe. Pas embarrassé pour un sou, Georges Gastaud reconnaît volontiers ces « tares ». Tout comme la « bureaucratie » ou la « dictature ». « Mais n’oublions pas que la Russie a été un pays martyr avec 30 millions de morts durant la Seconde guerre mondiale. Staline était encerclé: par l’Allemagne et l’Italie à l’ouest, par le Japon à l’est. Il y a une radicalisation du pouvoir tout comme lorsque Robespierre a instauré la Terreur durant la Révolution française. Je ne l’excuse pas et je pense même que ces méthodes étaient le choix de facilité. J’ai toujours été très critique à l’égard de l’URSS, je ne suis donc pas embarrassé avec ça aujourd’hui. »
Et en dépit de « ses erreurs », il lui trouve même du bon à cette « première expérience communiste ». « Elle empêchait le capitalisme d’aller jusqu’au bout. Depuis la chute du mur de Berlin, le capitalisme n’a plus de retenue. » Et puis tout n’était peut-être pas aussi mauvais qu’on veut bien le dire dans ce bloc de l’Est : « les soins gratuits, le plein emploi, le logement pour tous… ». « Les droits fondamentaux », comme il dit. « Le droit fondamental de l’ouvrier, c’est d’exercer son métier de ses mains. Ou d’avoir un toit comme lorsqu’il fait froid actuellement. » Et d’énumérer les promesses de la chute de Berlin non tenues : les paysans polonais venus « grossir les bataillons de chômeurs des villes », « les 35 000 enseignants virés en ex-RDA du jour au lendemain », etc.
Là, on va penser que notre prof de philo est un tantinet nostalgique. Qu’il lui tient à coeur de réhabiliter ces régimes poussiéreux et rêve encore à ce tout-puissant parti communiste d’après guerre. Même pas. « Etre communiste en 2010, c’est être visionnaire et non nostalgique. » Et comme le journaliste semble dubitatif (ça lui arrive), notre homme s’explique : « La question du communisme se pose aujourd’hui avec plus de pertinence qu’au XIXe siècle où elle était simplement une question de justice sociale. Aujourd’hui, elle est devenue une question de survie. » De survie ? Euh n’est-ce pas un peu fort ? « Dans le Capital, il est dit que l’humanité n’a que le choix de collectiviser ses moyens de prodution ou disparaître. Marx disait que le capitalisme ne fonde sa richesse qu’en épuisant la terre et l’ouvrier. » En épuisant la terre… Marx était-il écolo ? « Il existe des textes de Marx et de Lénine terriblement anticipateurs. Quand on les lit, on est ébloui. Les clés du XXIe siècle sont à chercher chez Marx et Lénine. »
• A (re)lire dans la même série : Avoir 19 ans et être de droiteCe contenu est © DailyNord. Si cet article vous intéresse, vous pouvez reprendre un extrait sur votre site (n’excédant pas la moitié de l’article) en citant bien évidemment la source. Si vous désirez publier l’intégralité de l’article, merci de nous contacter »
J’espère pouvoir lire bientôt « être encore socialiste aujourd’hui quelque soit l’âge »… Parce que ça doit être compliqué. En tout cas, entre le jeune de droite et le « vieux » coco, série sympa !
Etre communiste en France, à n’importe quel age, c’est surtout ne pas l’avoir vécu, venant de Pologne et vivant en France, je peux vous dire que c’est la plus grande connerie au monde. Souffrance, dictature, et surtout ne pas intrinsèquement avoir compris ce que l’Homme était, ses mécanismes, de survie, et de volonté de vivre.Donc au lieu de conceptualiser des choses… regardez vous dans une glace